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Des questions politiques récurrentes
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Un texte de Daniel Calin
 

Questions de définition

Les termes lai, puis laïc sont apparus aux XIIème siècle et XIIIème siècles. Ils proviennent du grec laikos, par l’intermédiaire du latin laicus, qui signifie peuple. Comme substantifs ou comme adjectifs, ils s’appliquent à toutes les personnes qui ne sont membres ni du clergé ni d’un ordre religieux. Apparus au XIXème siècle, laïque et laïcité en dérivent, mais en glissant vers le sens politique actuel. Ces mots renvoient dès lors à une opposition plus ou moins radicale à l’influence des religions sur la vie publique.

Notre République se veut laïque. La première phrase de l’article premier de la Constitution du 4 octobre 1958(1) stipule que « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. » On notera que l’affirmation du caractère laïque de la République française précède ici celle de son caractère démocratique. Mais qu’est-ce qu’une République « laïque » ?

Selon l’intitulé de la loi de 1905(2) qui en définit les principes en France, la laïcité se définit essentiellement par « la séparation des Églises et de l’État ». L’article 2 de cette loi précise une des règles déterminantes de l’État laïc : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. » On remarquera que cette prescription cardinale ne s’applique ni en Alsace ni en Moselle, trois départements annexés à l’Allemagne au moment du vote de la loi de 1905, auxquels on a conservé leur statut concordataire(3) lors de leur rattachement à la France en 1918. Aujourd’hui encore, la République française laïque finance les cultes et salarie les ministres des cultes dans ces trois départements, ce que ne manquent jamais de faire remarquer les opposants à la laïcité, à fort juste titre, même si cela ne va pas sans mauvaise foi.

D’autres articles renforcent cette distinction radicale du religieux et du politique. L’article 28 réglemente de façon très limitative la présence d’emblèmes religieux dans les espaces publics : « Il est interdit, à l’avenir, d’élever ou d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit, à l’exception des édifices servant au culte, des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments funéraires, ainsi que des musées ou expositions. » L’article 34 protège spécifiquement les fonctionnaires et agents des services publics des attaques des ministres des cultes : il prévoit des sanctions pénales pour « tout ministre d’un culte qui, dans les lieux où s’exerce ce culte, aura publiquement par des discours prononcés, des lectures faites, des écrits distribués ou des affiches apposées, outragé ou diffamé un citoyen chargé d’un service public ». Les articles 26 et 35 limitent sévèrement les interventions des ministres des cultes dans la vie politique. L’article 26 « interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l’exercice d’un culte. » L’article 35 interdit spécifiquement aux ministres des cultes, « dans les lieux où s’exerce le culte », toute « provocation directe à résister à l’exécution des lois ou aux actes légaux de l’autorité publique » et toute incitation « à soulever ou à armer une partie des citoyens contre les autres ».

On le voit, la laïcité telle qu’elle est définie par la loi française tend au fond à expulser le religieux de la sphère publique pour le cantonner autant que possible à la sphère privée. Cette volonté de refouler le religieux hors des espaces publics ne va pas sans poser problèmes. Longtemps les conflits se sont cristallisés autour des processions religieuses et autour des sonneries de cloches. On a vu en effet que l’article 1 limitait la liberté du culte par de possibles « restrictions (...) dans l’intérêt de l’ordre public ». L’article 27 confie la charge de la définition de ces restrictions à l’administration communale, avec appel à l’autorité préfectorale en cas de conflit. Dans tous les cas, ces restrictions sont donc soumises à l’autorité politique et non à l’autorité judiciaire, ce qui, aujourd’hui encore, donne pouvoir aux autorités politiques pour aller très loin dans cette logique restrictive si par aventure elles le souhaitaient. Même si les conflits autour des cloches et des processions se sont apaisés(4), ils resurgissent cependant de plus en plus ces dernières années autour des pratiques de religions non traditionnelles, l’Islam, certes, mais aussi les multiples sectes qui fleurissent depuis trois décennies.

Même si ces articles, en particulier l’article 35, dénotent une atmosphère politique pour le moins tendue, encore proche de la guerre civile, la loi de 1905 n’est pas pour autant une loi anti-religieuse, même si ses promoteurs étaient généralement des libres penseurs. Au contraire, son article 1 stipule : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public. » D’autres articles précisent les protections assurées à ces libertés de conscience et de culte. L’article 32 punit spécifiquement « ceux qui auront empêché, retardé ou interrompu les exercices d’un culte par des troubles ou désordres causés dans le local servant à ces exercices. » L’article 31 punit indifféremment toute personne qui tente de contraindre une autre personnes, par tout moyen, voies de fait, menaces ou chantages, « à exercer ou à s’abstenir d’exercer un culte, à faire partie ou à cesser de faire partie d’une association cultuelle, à contribuer ou à s’abstenir de contribuer aux frais d’un culte. »

 

Repères historiques

La laïcité s’inscrit en profondeur dans l’histoire de France(5).

Notre pays a d’abord été le lieu d’élection des conflits entre le catholicisme et le protestantisme. Dans l’Europe du Sud, la suprématie de l’Église catholique n’a jamais été menacée par le protestantisme, ni en Italie, ni en Espagne, ni au Portugal. Inversement, dans l’Europe du Nord, le protestantisme est devenu rapidement une religion d’État, quand il n’a pas été directement imposé par le pouvoir royal lui-même comme en Angleterre. En Allemagne, la Bavière est certes restée catholique, mais elle constituait alors un royaume indépendant. Seule la France a vu sa population se déchirer longuement, jusqu’à son sommet. Le souvenir horrifié des guerres de religion est certainement la racine la plus lointaine et la plus solide du laïcisme à la française. Malgré massacres, exils et déportations, le triomphe du catholicisme, avec la révocation de l’Édit de Nantes(6) par Louis XIV le 18 octobre 1685, ne parviendra jamais à éradiquer la présence protestante en France. La bourgeoisie protestante jouera un rôle important dans l’histoire de l’instauration de la laïcité en France, avec les milieux juifs, autre minorité religieuse longuement malmenée par les monarques catholiques. Aujourd’hui encore, la gauche française reste fortement marquée par des personnalités issues de ces deux minorités religieuses, traces vivantes actuelles du long combat laïc.

Les historiens(7) s’accordent à faire remonter l’idée laïque à la Révolution Française.

À la veille de la Révolution, l’édit du 28 novembre 1787 signé par Louis XVI, dit “édit de tolérance”, tout en réaffirmant d’abord la primauté exclusive du catholicisme, instaurait déjà, pour « ceux de nos sujets (...) qui ne sont pas de la religion catholique », la possibilité d’un mariage, d’un baptême ou d’une déclaration de naissance au près du juge royal du domicile, préfigurant ainsi la sécularisation de l’état civil qui deviendra effective quelques années plus tard, à travers diverses lois de 1789 à 1791.

Dès la nuit du 4 août 1789, le Décret relatif à l’abolition des privilèges(8) détruit les bases matérielles du pouvoir de l’Église. Élaborée suite à cette nuit mémorable, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 Août 1789(9) proclame le principe de la liberté d’opinion, religieuse inclus : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi » (article 10).

La loi sur la constitution civile du clergé adoptée par la Constituante le 12 juillet 1790 se substitue au concordat de Bologne du 18 août 1516. Très radicale à certains égards, mais aussi inscrite dans la tradition gallicane, cette loi vise pour l’essentiel à détacher le clergé de la papauté et à le soumettre au pouvoir politique national. Les conflits vont se cristalliser autour du serment exigé de tous les clercs à cette constitution civile du clergé. Le clergé lui-même va se diviser entre « prêtres jureurs » et « prêtres réfractaires ». Les fidèles catholiques eux-mêmes vont s’opposer, dans une atmosphère collective survoltée. Ces divisions sont la source d’une profonde fracture entre une France « éclairée », prête à une laïcisation avancée, et une France « obscurantiste », qui va basculer dans les luttes contre-révolutionnaires. On retrouve de fortes traces des lignes de fracture d’alors jusque dans la géographie électorale actuelle.

La Constitution du 3 septembre 1791(10) substitue à la monarchie de droit divin une monarchie constitutionnelle fondée sur le principe de la souveraineté du peuple et la séparation des pouvoirs, formalisant ainsi la naissance d’un État sans fondement religieux, donc laïcisé dans son principe. Le Concordat signé par Bonaparte en 1801 ne reviendra pas totalement en arrière : il reconnaît seulement le catholicisme comme la religion « de la majorité des Français », et non comme religion d’État. La première restauration, par la Charte du 4 juin 1814(11), rétablit, non sans quelques contorsions, le principe d’une monarchie de droit divin(12) et la définition du catholicisme comme religion d’État(13). Restauration d’emblée mal assurée et fragile : la révolution de 1830 se traduira par l’adoption de la Charte du 14 août 1830(14) qui abandonne, définitivement cette fois, le principe du droit divin comme l’idée d’une religion d’État(15).

Malgré tout, le courant monarchiste absolutiste et catholique restera suffisamment menaçant jusqu’à l’aube du vingtième siècle pour pousser les républicains vers les positions laïques tranchées qui ont abouti à notre forme actuelle de laïcité. Cette laïcisation renforcée va s’imposer en deux vagues, dans les années 1880 puis dans les années 1900.

La première vague touche essentiellement au système éducatif. Jules Ferry joue un rôle clef dans cette évolution. Dès 1879, le monopole de la collation des grades revient à l’État. La loi de 1882(16), selon son intitulé, « rend l’enseignement primaire obligatoire ». Il n’y est pas encore question explicitement de laïcité, contrairement à l’image ordinaire de cette loi. Mais elle opère bien une rupture fondamentale. En rupture avec la loi Guizot de 1850, elle supprime le contrôle de l’Église sur les écoles (article 3). Non seulement l’instruction religieuse n’est plus inscrite dans les contenus de l’enseignement primaire (article 1(17)), mais elle peut être donnée aux enfants des écoles publiques seulement « en dehors des édifices scolaires » (article 3). Même dans les écoles privées, l’enseignement religieux doit rester facultatif (deuxième alinéa de l’article 3). La loi du 30 octobre 1886(18) sur l’organisation de l’enseignement primaire parachève cette laïcisation de l’enseignement primaire, en réservant l’enseignement dans les écoles publiques à « un personnel laïque » (article 17), ainsi qu’en soumettant les écoles privées aux contrôles des inspecteurs publics (article 9 et articles 38 à 42).

Ce mouvement de laïcisation provoque de vives résistances des milieux catholiques et monarchistes. La France reste menacée de guerre civile, comme le montre le boulangisme(19) en 1888-1889. Les tensions vont être à leur comble avec l’affaire Dreyfus, qui verra ces milieux mener une campagne de haine à l’encontre des juifs, des protestants et des francs-maçons. La gauche républicaine réagira à ces menées menaçantes en se radicalisant. Soutenue par une nette majorité de la population à partir de 1889, elle va mener une politique de laïcisation étendue à l’ensemble des institutions publiques, clairement destinée à saper les bases du pouvoir de l’Église catholique et à délivrer la vie publique de son influence inquiétante. C’est dans ce contexte très conflictuel que s’inscrit la loi de 1905, précédemment évoquée, mais également diverses lois au fil de cette première décennie du XXème siècle, à commencer par la loi de juillet 1901 et son décret d’application d’août 1901(20), qui soumettent les congrégations religieuses au contrôle des autorités publiques, et la loi de juillet 1904 qui leur interdit l’enseignement.

Cette politique va incontestablement porter ses fruits : la restriction de l’influence du catholicisme et les évolutions internes de l’Église vont permettre une pacification des esprits. La constitution de 1946 définit, pour la première fois à ce niveau, la République française comme une République laïque : or, à ce moment-là, le Mouvement Républicain Populaire, parti d’obédience démocrate-chrétienne, est au pouvoir aux côtés du Parti Communiste et de la SFIO socialiste. Mais la question laïque ne cesse pourtant de resurgir régulièrement dans la vie politique française, du mouvement de défense de l’école confessionnelle en 1984 aux tensions actuelles autour de l’Islam.

 

Principes constitutionnels et législatifs actuels

Voici les points essentiels :

 

Les enseignants et la laïcité

Paradoxalement(22), les grandes lois laïques, de 1882 à 1905, ne sont guère précises quant aux obligations des enseignants des écoles publiques par rapport à la laïcité.

Dans le cadre des libertés constitutionnelles fondamentales, l’article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 sur les droits et obligations des fonctionnaires garantit la liberté d’opinion à tous les fonctionnaires : « La liberté d’opinion est garantie aux fonctionnaires. Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses (...) »(23).

Si les textes législatifs et constitutionnels sont clairs quant à cette liberté d’opinion, il n’en va pas du tout de même en ce qui concerne l’obligation de neutralité et l’obligation de réserve. Celles-ci sont plus des constructions de la jurisprudence, complexes et évolutives, que des obligations codifiées par la loi. Les principes peuvent sembler découler clairement des règles générales qui régissent l’État et le système éducatif public. Par exemple, puisque l’enseignement public doit, selon article L. 141-2 du Code de l’éducation, être donné dans un égal respect de toutes les croyances, il est évident qu’un tel respect des diverses croyances des élèves s’impose à tout enseignant. Cela semble d’ailleurs aller de soi aux yeux de la plupart des professeurs des écoles. Il est vrai qu’il ne leur viendrait guère à l’esprit de s’attaquer de front aux croyances religieuses de tel ou tel de leurs élèves, ce qui constituerait à l’évidence une faute professionnelle grave.

Cependant, les difficultés d’application de ce principe surviennent très vite, même à l’école primaire. Les programmes assignent à l’enseignement, dès le cycle III, une première formation aux démarches rationnelles et critiques, en particulier dans les domaines de l’histoire, de la géographie et des sciences expérimentales. Or, de telles démarches sont en elles-mêmes en opposition avec les principes fondamentaux de toutes les croyances religieuses, lesquelles vénèrent la soumission aux textes sacrés, aux traditions et aux autorités ecclésiales et ne peuvent que se sentir menacées par l’idée même d’examen critique. Ces programmes, par exemple, évoquent « une première approche des notions de classification, d’espèce et d’évolution ». Le catholicisme a certes renoncé depuis quelques décennies au dogme créationiste, mais il n’empêche que les familles de certains élèves des écoles publiques appartiennent à diverses religions minoritaires créationistes : peut-on « respecter leurs croyances » en traitant ce programme ? On sait quelles controverses virulentes cette question suscite aux Etats-Unis.

Le même principe du respect des croyances des élèves implique à l’évidence que les enseignants s’abstiennent de faire du prosélytisme pour leurs propres croyances. Il est cependant extrêmement difficile de déterminer où commence le prosélytisme. La jurisprudence établit une distinction nette entre ce qu’un enseignant peut s’autoriser hors des locaux scolaires et ce qu’il peut faire dans le cadre de son travail. Par exemple, l’arrêt du Conseil d’État dit Demoiselle Weiss du 28 avril 1958 a cassé « le refus de titulariser une institutrice stagiaire qui avait invité, par une lettre privée, une élève-maître d’une école normale d’instituteurs à assister pendant les vacances à des conférences dont certaines présentaient un caractère religieux ». Mais cette distinction n’est pas systématique : la jurisprudence tend aussi à considérer que l’image publique d’un fonctionnaire met en jeu l’image même de l’État, et cela d’autant plus que les fonctions qu’il occupe sont plus « visibles » ou qu’il occupe une place plus élevée dans la hiérarchie. Le devoir de réserve, dès lors qu’il sort du cadre strict du travail, menace donc toujours d’entrer en contradiction avec la liberté d’opinion pourtant légalement accordée aux fonctionnaires comme à tous les citoyens.

Ces débats anciens sur les limites du droit à manifester ses opinions s’est récemment cristallisé autour de problèmes posés par le port de signes religieux, en particulier le port du voile islamique. On sait qu’une loi de mars 2004 a interdit « le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse ». Pour ce qui est des fonctionnaires eux-mêmes, un arrêt du Conseil d’État du 3 mai 2000(24) avait précédemment confirmé le licenciement d’une surveillante d’externat portant foulard islamique dans l’exercice de ses fonctions, après avoir argué que « le principe de laïcité fait obstacle à ce que [les agents du service de l’enseignement public] disposent, dans le cadre du service public, du droit de manifester leurs croyances religieuses », avait conclu que « le fait pour un agent du service de l’enseignement public de manifester dans l’exercice de ses fonctions ses croyances religieuses, notamment en portant un signe destiné à marquer son appartenance à une religion, constitue un manquement à ses obligations ». Plus tard, dans une affaire mettant en jeu le port du foulard islamique par une contrôleuse du travail, un arrêt de la Cour d’appel administrative de Lyon, en date du 27 novembre 2003(25), avait confirmé que « le principe de laïcité de la République, affirmé par l’article 1er de la Constitution, qui a pour corollaire nécessaire le principe de neutralité des services publics, fait obstacle à ce que les agents publics disposent, dans le cadre du service public, du droit de manifester leurs croyances religieuses ».

Reste que ce principe de neutralité des services publics pose en réalité des problèmes plus complexes que ne le laisse supposer cette jurisprudence apparemment limpide, en particulier dans le cadre du système éducatif. En effet, les principes mêmes de notre scolarisation sont tous sauf neutres. Par exemple, scolariser un enfant en France, c’est par exemple l’inscrire dans une institution qui repose sur des principes égalitaires stricts, en particulier entre garçons et filles. Le moins qu’on puisse dire est que ce principe n’est guère compatible avec certaines croyances religieuses. Il est même probablement incompatible avec toutes les traditions religieuses. De même, l’école française est mixte(26). On sait à quel point cette mixité pose problème aux fidèles de certaines religions, surtout dans leurs courants fondamentalistes. Et nous avons déjà vu que les contenus des programmes d’enseignement reposent largement sur des valeurs de rationalité, d’esprit critique et de vérification expérimentale qui sont au fond contraires à la notion même de croyance religieuse. La volonté contemporaine, pourtant assez largement partagée, de substituer une laïcité de tolérance, centrée sur la notion de neutralité, à la laïcité de combat qui a longtemps animé la Troisième République, n’a certainement pas fini de se heurter à la contradiction structurelle entre rationalité et religiosité.

Daniel Calin
Septembre 2006


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Propositions bibliographiques


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Propositions bibliographiques

(1) Texte intégral actuellement en vigueur ICI.

(2) Texte intégral ICI.

(3) Contrairement à ce que l’on imagine généralement, ce statut concordataire n’est pas celui des Églises en Allemagne, mais celui qui a été instauré en France en 1801 par Bonaparte. Ce statut avait été conservé à ces régions lors de leur annexion par l’Allemagne, modifié seulement par l’adjonction de certaines dispositions du droit allemand de l’époque. Il faut noter que ce régime, aujourd’hui encore, n’est applicable qu’aux quatre cultes reconnus par le Concordat de 1801 : catholique, luthérien, calviniste et israélite.

(4) Essentiellement, me semble-t-il, de par la conjonction entre urbanisation et déchristianisation : les déterminismes sociologiques me semblent peser plus en ces domaines qu’une très hypothétique montée de l’esprit de tolérance.

(5) On peut faire remonter bien plus avant encore la question de la séparation de l’Église et de l’État. L’histoire de l’Europe de l’Ouest a été travaillée par un conflit tantôt larvé ou tantôt ouvert entre le pape et l’empereur. Dès le Vème siècle, le pape Gélase Ier avait énoncé la doctrine des deux glaives visant à séparer le pouvoir temporel et l’autorité spirituelle. C’est peut-être l’absence de tradition théocratique en Europe qui a ouvert la voie aux sécularisations modernes des États, quelles que soient les formes très diverses que ce mouvement de sécularisation ait pu prendre en fonction des particularités de l’histoire de chaque nation.

(6) Rappelons que l’Édit de tolérance avait été signé à Nantes le 13 avril 1598 par Henri IV, le grand-père de Louis XIV. Henri IV, protestant convaincu, avait dû abjurer le protestantisme le 25 juillet 1593 à Saint-Denis pour asseoir son autorité sur son royaume, ce qui avait plus contribué à faire flamber les guerres de religion qu’à les apaiser. C’est l’Édit de Nantes qui ramènera la paix civile, progressivement et pour un temps seulement.

(7) Voir en particulier : Jean Baubérot (2000), Histoire de la laïcité en France, col. Que sais-je ?, P.U.F., Paris.

(8) Texte intégral ICI.

(9) Texte intégral ICI.

(10) Texte intégral ICI.

(11) Texte intégral ICI.

(12) Qui n’apparaît en réalité que très indirectement, par la conjonction des premiers mots de son préambule (« La divine Providence, en nous rappelant dans nos Etats après une longue absence... ») et de l’affirmation selon laquelle la charte n’est « octroyée » que « par le libre exercice de notre autorité royale ».

(13) La liberté religieuse est proclamée par l’article 5 (« Chacun professe sa religion avec une égale liberté, et obtient pour son culte la même protection. ») avant que l’article 6 ne précise : « Cependant la religion catholique, apostolique et romaine est la religion de l’État ». L’article 7, en flagrante contradiction avec l’article 5, proclame : « Les ministres de la religion catholique, apostolique et romaine, et ceux des autres cultes chrétiens, reçoivent seuls des traitements du Trésor royal ».

(14) Texte intégral ICI.

(15) Plus précisément, cette charte reprend tel quel l’article 5 de la Charte de 1814 sur la liberté de culte, élimine l’article 6 sur la religion d’État, mais reprend pour l’essentiel sur le fond l’article 7 de la Charte de 1814 : « Les ministres de la religion catholique, apostolique et romaine, professée par la majorité des Français, et ceux des autres cultes chrétiens, reçoivent des traitements du Trésor public » (article 6 de la Charte de 1830). En toute contradiction, toujours, avec l’article 5 de la même charte...

(16) Texte original intégral ICI.

(17) Le premier alinéa de cet article substitue, de façon particulièrement significative, l’instruction morale et civique à l’instruction morale et religieuse des programmes antérieurs.

(18) Texte intégral ICI.

(19) Voir ICI sur Wikipédia.

(20) Textes intégraux actuels ICI.

(21) Repris par le préambule de la Constitution de 1958, ce préambule a toujours valeur constitutionnelle.

(22) Ce paradoxe tient probablement surtout à nos problématiques contemporaines : la formation des instituteurs et institutrices a fait longtemps de la quasi totalité d’entre eux, sinon toujours des anti-cléricaux, mais pour le moins des militants acharnés de la République laïque. Ces hussards noirs de la République n’avaient certes guère besoin de se voir imposer des cadres quant au respect de la laïcité de leur enseignement.

(23) Forme actuellement en vigueur de cet article.

(24) Affaire Delle Marteaux.

(25) Affaire Melle Nadjet X.

(26) C’est en réalité un phénomène relativement récent. Il faut rappeler que l’école de la Troisième République interdisait la mixité, sauf dérogations. Par exemple, la loi Goblet du 30 octobre 1886 n’autorise la mixité que dans les communes de moins de 500 habitants. La mixité s’est instaurée progressivement beaucoup plus tard, au cours des années 1960. Elle ne s’est généralisée qu’au début des années 1970.


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