Psychologie, éducation & enseignement spécialisé
(Site créé et animé par Daniel Calin)

 

Théorie de l’extensio et mondialisation

 

 
Un texte d’Eugène Michel


 

Pour la théorie de l’extensio, la mondialisation est inévitable. En effet, il n’y a aucune raison pour que l’extension du champ relationnel des êtres humains n’atteigne pas toute la planète. De plus, l’universalisation de l’écriture ne peut que densifier cette mondialisation, en particulier en favorisant les échanges.

Mais revenons aux trois grands modes chronologiques d’extensions de la vie décrits par notre théorie : d’abord le nombre, puis l’expansion et enfin la recherche d’efficacité.

Chez les humains, le nombre n’a fait qu’augmenter, l’expansion se poursuit en tout recoin de la surface terrestre, et la recherche d’efficacité dynamise l’innovation.

On se souvient que la théorie de l’extensio décrit trois étapes successives : familiale, collective et individuelle. Dès l’étape familiale, les trois modes d’extensio apparaissent : le nombre a permis aux tribus familiales d’essaimer à partir de l’Afrique vers les autres continents, puis les outils ont été inventés. Quant à l’étape collective, elle produit une structuration très efficace de l’expansion par la pérennité des pays, actuellement au nombre voisin de 200.

La théorie de l’extensio affirme que les pays très scolarisés ont atteint l’étape individuelle. L’impact de cette étape sur la mondialisation est fort visible par les déplacements individuels du tourisme. Mais que se passe-t-il au niveau des entreprises ?

En terme de mondialisation, on voit bien que les nations sont une étape certes nécessaire mais qui devient bientôt un obstacle. Le cloisonnement qui subsiste est rendu inévitable par la diversité des langues. Mais également par les frontières naturelles que forment les montagnes et les océans.

On peut imaginer bien sûr l’émergence d’un gouvernement mondial, ce que les organisations internationales laissent entrevoir. Cependant, les difficultés pour réaliser l’Europe laissent penser que plusieurs siècles seront nécessaires.

Les firmes multinationales peuvent être considérées comme une façon de s’affranchir de l’obstacle des nations pour accroître la mondialisation.

Les bénéfices rencontrés par les entreprises qui se multinationalisent sont un meilleur contrôle des matières premières, l’augmentation des échanges et de la créativité, la réduction des coûts, l’émancipation des contraintes fiscales et sociales.

Encore est-il nécessaire que les pays se stabilisent au niveau mondial et que la communication s’améliore. Ces conditions sont réunies depuis la fin de la guerre froide et avec la numérisation. Au cours des trente dernières années, le nombre de multinationales est passé de 10 000 à près de 100 000 et elles réalisent 70% du commerce mondial.

Les très hauts revenus des dirigeants des multinationales indiquent l’ampleur des enjeux mais aussi la forte individualisation des managers.

La théorie de l’extensio avancera l’idée paradoxale que c’est l’étape individuelle qui rend possible l’émancipation des entreprises du carcan national de l’étape collective par le moyen des multinationales.

On comprend dès lors l’inquiétude croissante des citoyens et des États devant ce phénomène irrésistible. Une sorte d’emballement infernal de la finance et de la recherche de profits peut faire craindre un effondrement planétaire de la production et du commerce. D’autre part, les nuisances sociétales et écologiques suscitent d’importantes protestations qui s’identifient sous le nom d’altermondialisme.

On s’interroge en urgence sur les régulations possibles, d’autant que les nations ont trop souvent tout accepté de ce qui était au départ leur émanation, c’est-à-dire l’entreprise. L’actuel débat au sujet des « paradis » fiscaux – par lesquels transiterait la moitié du flux mondial des capitaux – tend à faire penser que l’époque d’une connivence nations-multinationales va bientôt être révolue.

La réduction des profits des multinationales que génèrent la protection de l’environnement, le souci des travailleurs, la lutte contre le chômage, la contribution à l’aide aux démunis n’est possible, du fait de l’intense compétition mondiale, qu’avec une coordination des nations.

Pour le moment, quand on ajoute les risques provoqués par la raréfaction des matières minérales, l’accélération des flux financiers et enfin l’intensification des rivalités économiques, l’avenir de la mondialisation paraît compromis.

Chaque fois qu’un emballement d’extensio se produit – que ce soit en nombre, en expansion ou en efficacité – il y a un risque élevé d’effondrement. Mais ce n’est pas une fatalité.

Les actuelles conditions de travail sommaires voire délétères dans les pays non-occidentaux font penser aux débuts de l’industrialisation en Europe au 19e siècle. Le rôle du charbon et du pétrole étant considérable, tout pourrait s’effondrer en cas de pénurie. Les déplacements de personnes et de marchandises redeviendraient limitées.

On peut imaginer alors qu’une nouvelle mondialisation se développera, moins grossière dans ses impitoyables compétitions, plus subtile, fondée sur la circulation du savoir rendue possible par le web. Les régions réinventeront peu à peu une autonomie énergétique et alimentaire, le travail retrouvera les atouts de la proximité grâce à des firmes « multi-locales » et les individus s’offriront des aventures plus créatives que le tourisme de masse.

Eugène Michel
Mai 2013

 
*   *   *
*

Informations sur cette page Retour en haut de la page
Valid XHTML 1.1 Valid CSS
Dernière révision : mercredi 19 février 2014 – 18:00:00
Daniel Calin © 2014 – Tous droits réservés