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Théorie de l’extensio et féminisme en France

 

 
Un texte d’Eugène Michel

 

Notre pays a beau s’enorgueillir d’avoir été pionnier en démocratie, on s’étonne de l’infantilisation que les françaises subissaient il y a encore une cinquantaine d’années. Qu’on se rende compte : une épouse ne pouvait pas travailler sans l’autorisation de son mari !

Mais force est de constater que la situation reste mitigée : les femmes subissent toujours les agressions verbales ou physiques des hommes ; à travail égal, elles sont moins payées ; elles effectuent en priorité les tâches domestiques ; elles jonglent entre le temps familial, le temps professionnel et le temps personnel ; leur situation à la retraite est défavorable.

Nous allons étudier ici quelle analyse féministe découle de la théorie de l’extensio.

La théorie de l’extensio décrit le développement individuel et collectif selon quatre étapes successives réalisées grâce à l’acquisition d’outils en gigogne : les sens, le geste, la parole et l’écrit. Ces étapes sont l’étape maternelle, l’étape familiale, l’étape collective et l’étape individuelle.

Nous émettrons l’hypothèse que la lutte féministe dans certains pays provient d’une différence d’acquisition des étapes entre l’homme et la femme.

Pour cela, remontons dans le temps, à l’essor de l’étape collective après le Moyen Âge. La théorie de l’extensio affirme que cette étape est portée par l’écrit, avec, comme événement majeur, l’invention de l’imprimerie au milieu du 15e siècle. Les hommes vont monopoliser l’écrit par rapport aux femmes au moment où celui-ci devient fondamental pour les lois, les sciences, le commerce.

On peut dire que le passage à l’étape collective va être exploré principalement par les hommes, et que, plus tard, découvrant l’avantage d’extensio que cela représente, ils s’organisent pour restreindre les femmes à l’étape précédente, l’étape familiale.

Ce monopole masculin de l’étape collective est décelable dans les débats sur l’éducation des jeunes filles lors des lois de généralisation de l’enseignement à la fin du 19e siècle et dans l’absence de droit de vote et de droit de signature pour les femmes tout au long de la 1ère moitié du 20e siècle.

Toutefois, un consensus put s’établir car les hommes avaient à supporter deux graves inconvénients de l’étape collective : le travail salarié contraignant et la mobilisation en cas de guerre.

Cependant, la généralisation de l’enseignement provoqua l’émergence de l’étape suivante, l’étape individuelle. Les deux guerres mondiales peuvent s’interpréter – en termes d’extensio – comme l’ultime résistance de l’étape collective contre l’étape individuelle. C’est la seconde qui a gagné.

Les femmes – d’une part, toujours brimées pour l’étape collective et d’autre part pionnières dans le souci du corps – devinrent les vraies conquérantes de l’étape individuelle, mettant ainsi en œuvre un extensio très compétitif par rapport à celui des hommes. L’ancien équilibre du couple s’est alors brisé et l’on a assisté à une multiplication des divorces.

L’extensio ne s’arrêtant jamais, les femmes négligèrent l’étape collective accaparée par les hommes pour accéder directement à l’étape individuelle.

On notera que les problèmes féministes énumérés plus haut relèvent presque tous de l’étape collective. On y ajoutera la moindre implication politique, avec pour corollaire, un nombre moins élevé de députés. À l’opposé, les femmes bénéficient de l’attention au corps propre à l’étape individuelle, ce qui leur fait connaître une espérance de vie plus longue que celle des hommes.

On assiste toutefois à la lente mais inexorable conquête de l’étape collective par les femmes. Quant aux hommes, les nouvelles générations commencent à revendiquer une place dans l’étape familiale jusqu’à un rôle égal à celui de la mère vis-à-vis des enfants. Ceci est loin d’être acquis, comme on le voit lors de la décision de garde des enfants en cas de séparation.

Dans cette évolution irrésistible, les nouvelles générations accèdent peu à peu à une mixité amicale que le numérique favorise. Dévaloriser une moitié de la population est devenu une absurdité. La réconciliation est favorisée par la reconnaissance de l’homosexualité qui s’avère tout à fait symétrique pour les hommes ou les femmes. Et, par rapport aux enfants, si les femmes doivent tenir compte de la barrière physiologique de la ménopause, les hommes rencontrent un obstacle plus important encore : ils ne peuvent devenir pères sans l’accord d’une femme.

On peut donc prévoir les tendances suivantes qui sont propices à l’épanouissement collectif :

La théorie de l’extensio est basée sur la constatation que tout être a besoin d’élargir son champ relationnel pour moins dépendre d’un environnement limité qui risquerait d’être défaillant dans son rôle de fournisseur d’apports. L’extraordinaire allongement de l’espérance de vie qui s’est accomplie au 20e siècle et l’accession des femmes à l’étape individuelle a fait décliner le schéma précédent, celui de l’étape collective, où la femme s’appuyait fortement sur l’homme pour assurer les apports nécessaires à son organisme. De sorte qu’aujourd’hui, la compétition entre les êtres est devenue mixte.

Dans cette compétition, le féminisme reste d’actualité. L’État – qui relève de l’étape collective – se doit d’intégrer, à égalité avec les hommes, les femmes dans la vie politique et professionnelle. Une vigilance est également nécessaire pour certains comportements nocifs des hommes vis-à-vis des femmes.

La théorie de l’extensio confirme aussi la pertinence des revendications familiales des hommes. Curieusement, il n’existe pas d’équivalent au mot « féminisme » pour les hommes. L’homme qui défend son rôle parental est finalement considéré comme étant lui-même féministe. C’est en quelque sorte continuer à donner une plus grande légitimité à la femme dans le rôle éducatif.

Si les étapes du développement sont portées par la parole et l’écrit, donc par les mots, on ne s’étonnera pas que le langage conforte les situations anciennes car il en provient. À cet égard, on peut tout autant protester contre l’utilisation du mot « Homme » avec un H majuscule que s’étonner de l’expression « école maternelle ». Pour ne risquer d’exclure personne, il vaudrait mieux parler d’Humain et d’école parentelle.

Eugène Michel
Novembre 2013


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Dernière révision : samedi 18 janvier 2014 – 16:50:00
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