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Inventaire des obstacles à la réception de la théorie de l’extensio

 

 
Un texte d’Eugène Michel
 


 

Il y a quatre approches possibles de la théorie de l’extensio :

Chacune génère des obstacles soit par la nécessité de connaître le domaine concerné, soit par les résistances à la nouveauté.

 

1) D’abord, la théorie de l’extensio affirme que le développement individuel reproduit dans ses grandes lignes le développement collectif.

Ce principe enfreint un tabou qui est celui de relier l’individuel au collectif. Mais sa conséquence est de proposer des étapes du développement en gigogne : familiale-village, collective-pays, individuelle-monde. Dans la première étape apparaît la religion ; dans la deuxième la démocratie ; dans la troisième la prépondérance corporelle.

Là surgit notre premier obstacle : la majorité des humains se situent préférentiellement dans une étape, ils ont donc tendance à refuser la notion d’étapes. Plus l’étape est ancienne, plus on risque de la considérer comme un absolu et voir la suite comme anecdotique. Si l’étape est récente, les étapes précédentes peuvent être rejetées en bloc.

 

2) Le deuxième obstacle est radical puisque l’on demande au lecteur de savoir précisément ce qu’est un neurone et de connaître son rôle par rapport aux récepteurs sensoriels et aux muscles. De plus, il s’agit d’établir un parallèle entre la phylogenèse du système nerveux et son ontogenèse.

Les neurones permettent l’acquisition d’aptitudes précises. La théorie de l’extensio insiste sur l’apparition successive, chez les animaux pluricellulaires, des sens, des gestes, de la parole et de l’écrit.

Une cascade d’obstacles en découle : l’intégration des humains dans le cursus animalier peut rebuter, l’importance de l’écrit peut être niée, enfin on a l’habitude d’intégrer parole et écrit dans la notion de langage.

 

3) Le concept d’habitus préexistait, mais le sociologue Pierre Bourdieu en a fait un outil très efficace de compréhension des comportements humains. Ce concept est important pour la théorie de l’extensio car il conforte la notion d’étapes du développement.

Mais, plus innovant, le biologiste Jean-Pierre Changeux a forgé le concept d’habitus neuronal qui a généré, pour l’extensio, ceux d’inventus neuronal et d’inventus.

De nouveaux obstacles surgissent : les sociologues soit refuseront l’importance accordée à l’habitus, soit nieront l’utilité de compléter cette notion par celle d’inventus. Également, les spécialistes de la créativité n’apprécieront pas cette incursion dans leur domaine.

 

4) Enfin, la dernière approche est peut-être la pire. La théorie de l’extensio s’inscrit dans la science de l’évolution. La vie étant définie, dès la première cellule, par la reproduction d’un volume clos, il en résulte le besoin d’apports et l’orientation constante de l’évolution vers l’élargissement du champ relationnel pour moins dépendre d’un environnement limité.

L’obstacle principal est encore l’intégration des humains dans le cursus animalier, mais aussi celui d’une vision très humble de nos motivations. Quant aux spécialistes de l’évolution, ils auront du mal à imaginer que la diversité animale et végétale puisse se rapporter à un seul moteur.

 

En conclusion, nous le voyons, les obstacles à la réception de la théorie de l’extensio sont nombreux, aussi bien pour le grand public qui doit acquérir une large palette de connaissances et se dégager de ses certitudes que pour les spécialistes qui doivent accepter une contestation créative venue de l’extérieur.

La réserve principale qui a été apportée à la théorie de l’extensio, c’est l’argument qu’elle ne serait pas scientifique car ne répondant pas au critère principal de réfutation possible. La réalité est différente puisque justement un débat très intéressant est né à propos des cas particuliers de l’évolution animale.

Également, a été émis l’avis qu’il ne s’agit pas d’une théorie au sens d’un modèle permettant une prédiction de phénomènes. À l’inverse, nous pensons que l’extensio permet de supposer qu’une cinquième étape du développement est en cours d’exploration, mais aussi que l’utilisation dynamique des quatre outils génère un épanouissement. Cependant, s’agissant en grande partie d’une synthèse de divers savoirs préexistants, l’auteur ne voit pas d’obstacle à ce qu’on parle de « Traité de l’extensio » plutôt que de théorie.

Le plus extraordinaire, c’est que, malgré tous les obstacles, il se trouve des personnalités pour accueillir favorablement la théorie de l’extensio. On peut même dire que celle-ci n’a pu s’affiner depuis vingt ans que grâce à des rencontres privilégiées. Les spécialistes les plus intéressés appartiennent aux sciences de l’éducation et au management, mais aussi à la biologie et à la sociologie.

Eugène Michel
Mai 2016

 
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Dernière révision : lundi 09 mai 2016 – 17:55:00
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