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Un texte de Laurent Carle
Psychologue scolaire




« Tu ne dois pas te tromper, tu ne dois pas faire avant de savoir, lire avant d’avoir appris à lire, écrire avant, apprendre en collaboration avec tes pairs. Et si tu es défaillant, inadapté aux méthodes qui te sont imposées, c’est que tu n’es pas autonome. Tu n’es pas capable d’apprendre seul. Cependant, tu ne dois pas solliciter l’aide de tes pairs, ce serait tricher. Tu n’arrives pas à suivre la méthode choisie par le maître, tu es donc malade. On va te prendre en charge hors de l’école. Tu y seras soigné pour te maintenir en position de figurant dans le jeu compétitif sans fin. »


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C’est, depuis la création du collège unique dans les années 70, le message implicite adressé à tout écolier « en échec ».

Dans sa lettre aux sociétaires n° 52 d’avril 2013, la MAIF alerte à la fois sur les dangers des nouvelles technologies et sur les apprentissages en danger. Le premier danger viendrait de la cyber-communication, de l’extérieur. Le deuxième semble venir exclusivement de l’immaturité ou du dysfonctionnement du cerveau, des écoliers, donc d’une défaillance interne. La relation maître-élève, le mode et les méthodes d’enseigne­ment seraient aboutis, parvenus à la perfection. Conditions et variables institutionnelles seraient parfaites pour éduquer et garantir la « réussite » scolaire. Ce postulat entraîne la mutuelle vers une position et dans une démarche discutables. Au lieu de promouvoir les méthodes actives, les interactions entre pairs, l’entraide, la coopération, le socio-constructivisme, la MUTUALITE des apprentissages et des enseignements, et, surtout, le questionnement des clichés, traditions et routines didactiques, notre MUTUELLE enseignante, réputée pour son mutualisme militant, oubliant les principes qui la fondent (indépendance, autonomie, solidarité, responsabilité, entraide, républica­nisme, principe du profit collectif, refus de l’actionnariat et des profits individuels, redistribution, partage, bien commun), encourage et cautionne la médicalisation des apprentissages et les « prises en charge » individuelles. Cette approche médicalisée infantilise les élèves, déresponsa­bilise les enseignants, légitime l’invention de « troubles tantôt médicopsychologiques, tantôt organiques purs (selon les préjugés des écoles de pensée en concurrence), intraitables en milieu scolaire » et leur repérage précoce « préventif » ! Pourquoi ? L’école du « chacun pour soi » serait immuable et invariable parce qu’en adéquation totale avec la psychologie de l’élève (normal) et celle des apprentissages en compétition (concordants avec la méthode préférée du maître), mais « désarmée » face aux nombreuses pathologies juvéniles qu’on découvre sans cesse et qu’on dépiste sans répit, de plus en plus tôt. Il faudrait soigner les enfants de plus en plus jeunes, individuellement. Quant à l’école, il n’y faut rien changer ! On y apprend seul et chacun pour soi pour le bonheur de ceux qui « réussissent » (qui gagnent). Selon cette théorie, l’école n’est pas un système éducatif public destiné à l’enseignement et à l’éducation en communauté d’apprentissage des petits Français mais un parcours sportif dans lequel se trouveraient – si on cherche bien – bon nombre d’invalides mentaux et cérébraux, inadaptés à la compétition scolaire. Ce parcours et la pédagogie sont incompatibles. La sélection y est la règle et la pédagogie, son exception. Exception suspecte soupçonnée de fausser les résultats de la sélection naturelle par libre concurrence. À l’opposé de la pédagogie, la médicalisation soigne dehors le perdant forcément malade, sans changer la règle dedans. Or, plus que de réparation préventive précoce solitaire en réplique, l’enfant, mis en échec par des méthodes d’un autre âge et un management d’entraîneur-sélectionneur, a besoin d’apprentissage coopératif actif créatif commun. La sollicitude charitable individualisée de cabinet ne remplace pas l’intelligence sociale solidaire d’école. Si c’était propice à l’égalité des « chances », alors il vaudrait mieux clore les comptes d’assurance mutuelle commune et ouvrir des cabinets de conseil en placement financier afin que les « bons » assurés puissent alimenter leur grenier d’écureuil boursicoteur par des actions de rentier de casino à panse ronde, tandis que les « mauvais élèves », pour n’avoir pas « bien travaillé » perdraient leurs économies et leurs biens mal assurés. Le sociétariat devrait laisser la place à l’actionnariat. Et que le meilleur gagne !


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Faut-il soigner tous les concurrents malchanceux, tous les perdants, médicaliser l’école ou adopter un logiciel qui accorderait aux enfants le statut d’apprenant, le droit à l’erreur et à la dignité ? Faut-il changer l’école ?
 

Affubler d’un trouble de l’apprentissage les concurrents malchanceux, qui ne figurent pas bien placés dans le peloton qui mène la course, plutôt que de répondre au « problème » par une pédagogie adaptée, n’est-ce pas un abus de langage, une explication réductrice ? Pour être républicaine, sociale, démocratique, l’école pour tous, l’école publique, comme les assurances mutuelles, doit viser un but collectif, le bien de tous, et non promettre à qui la mériterait la réussite individuelle, qui ne concerne qu’un petit nombre d’élus privilégiés, les gagnants, toujours les mêmes, enfants de cadres et d’enseignants. L’assistance et la prise en charge des éclopés de la compétition scolaire à la française est plus proche de l’assurance d’entreprise américaine individualisée et rentabilisée que des assurances mutuelles de Niort. Le secours médicalisé pose des rustines sur la tête des perdants. Il vient déculpabiliser les managers qui se désolent de voir leurs poulains mal classés brouter l’herbe sur le pré à côté de la piste. Et pour cause, la ligne d’arrivée n’est pas assez large pour une fin de course groupée frontale. Et quand bien même, le but d’une compétition n’est jamais de faire gagner tous les participants. Ce qui produit l’échec (scolaire) individuel qui touche statistiquement les enfants des classes populaires, c’est cette politique de la réussite individuelle. Ce n’est pas un hasard, c’est stratégique. C’est la fonction de reproduction de la division sociale. L’enseignement de la « lecture » y participe. Pourtant, si tout le monde ne peut pas devenir polytechnicien – le concours d’entrée, comme son nom l’indique, se déroule à l’entrée, une fois par an, non au CP, toute l’année – tous peuvent devenir lecteurs, instruits, citoyens de la république, amateurs d’art et de littérature plutôt que de publicités et de téléréalités, à condition de remplacer la compétition scolaire par la pédagogie coopérative. La médecine de « l’échec » n’est pas complémentaire à la pédagogie, elle y remédie. Ou plutôt, elle s’installe dans sa béance. L’explication « scientifique » des « échecs » écarte le doute et les questionnements, fournit des certitudes, soulage l’âme, déculpabilise. Autrefois puni, le « mauvais élève » est maintenant soigné. C’est pourquoi, soulagés et secourus, mais déchargés, les enseignants ni les parents d’élèves n’y voient à redire. Il faut bien chercher ailleurs ce qu’on ne trouve pas dans l’école ! Mais ce progrès éthique se paie au prix du refoulement pédagogique. Quand le doute s’estompe, avec lui disparaissent l’interrogation, la recherche et la réflexion. On ne se demande pas pourquoi les 25 % d’élèves entrant en 6e sans savoir lire sont issus des classes sociales inférieures, ni pourquoi les enfants de cadres, de professions libérales et de profs y arrivent collectivement lecteurs. « C’est la faute à la DYS ! » Les troubles de l’apprentissage ne frapperaient-ils que les pauvres ? L’option pathologique choisie ici, DYS, préfixe qui ne se contente pas d’un seul radical, devenu locomotive pour accrocher d’innombrables wagons, pose le postulat de dysfonctionnements qui troubleraient le cerveau de l’enfant apprenant, pas celui de l’adulte enseignant. Elle renforce dans l’opinion le préjugé que, non seulement la qualification pédagogique des professeurs serait d’un incontestable très haut niveau, mais qu’aucun adulte en position de diriger un apprentissage ne pourrait se tromper, même dans un pays, comme la France, où n’existe aucune formation professionnelle bien nommée pour les enseignants. Un enfant peut être défaillant ou troublé, un adulte certifié prof serait toujours lucide et infaillible. Quand un élève est puni « pour le travail » et mal noté, avec commentaire désobligeant, ce serait pour son bien. Quand il est soigné, ce serait en vue de l’amélioration de son bulletin de notes. Bref, en orientant le regard de ses adhérents sur les « dysfonctionnements de l’enfant », la MAIF exonère les institutionnels de toute réflexion sur les dysfonctionnements de l’école produits par l’idéologie du « mérite » individuel. La pédagogie en collectivité éducative, autrement dit la démo­cratie à l’école, ne serait pas le fondement de la pensée mutualiste. Plus on est savant expert en pathologies scolaires, préscolaires et postscolaires, plus on refoule la pédagogie, pourtant valeur universelle et seul remède véritable à toute difficulté d’apprentissage. On crée un faux problème qui fait peur, les maladies de l’enfance à l’école, et on rassure par du soin. Or, le vrai problème, l’enseignement formel et rigide de notions, de règles, de définitions, de programmes, à mémoriser par cœur à la maison, qui empêche de communiquer et d’agir en classe pour apprendre, n’est pas évoqué. Renommer les difficultés scolaires « troubles spécifiques des apprentissages » et en localiser la cause a priori dans le cortex ou dans l’esprit des enfants, c’est aller bien vite en besogne, c’est négliger les facteurs environnementaux, le contexte scolaire, l’effet système, l’effet maître, la carence pédagogique, la méthode dite de « médiation phonologique » qui fait du décodage (du bruit de la lettre) « la condition sine qua non de l’apprentissage de la lecture ». Dans tout système scolaire, il y a des acteurs : l’élève, le maître, l’institution, des outils : le contenu enseigné, la méthode d’enseignement, la relation maître-élève, toutes variables susceptibles de perturbations. La recherche qui fixe un œil sur l’élève et ferme l’autre pour ne pas examiner alentour n’est pas scientifique. C’est, du vaste champ d’observation, une vision réductrice et borgne, qui écarte de l’activité de lecture la pensée et l’action de l’apprenti-lecteur pour donner le monopole à l’association réflexe graphème-phonème, dite « mécanisme de lecture ». C’est faire l’impasse sur la définition de ce que c’est que lire et apprendre à lire pour ne prendre en considération que la lecture qu’on enseigne à l’école sur le modèle de celle qu’on pratiquait dans les manuscrits du Moyen Âge, avant l’invention de l’imprimerie. Réduire une activité aussi complexe, l’acte de lire, à une mise en son méthodique des lettres de l’alphabet, est une falsification. Il n’existe pas de lecture élémentaire pour lecteur débutant. Syllabes et sons ne sont pas des unités de lecture. Toute lecture est complexe dès le début, sauf dans les syllabaires commercialisés sous l’appellation « méthode de lecture ». Tous les lecteurs du monde lisent et pensent l’écrit avec les yeux. Il n’y a que dans les écoles, dans les labos de neuropsychologie et dans les centres « dys » qu’on lit avec les oreilles et qu’on sonorise les lettres avec la bouche. La médicalisation innocente le suspect de paresse mais lui pose une étiquette indécollable. La priorité d’un intervenant tiers est de changer le regard de la maîtresse sur l’enfant « en échec ». Ce n’est pas facile. Souvent, la « prise en charge » confirme et aggrave mécani­quement les soupçons d’anormalité. Il n’est pas certain que l’enfant, étiqueté dyslexique ou dysphasique, à partir de théories qui promettent l’accès au sens de l’écrit par le déchiffrage médicalisé, redoublement du déchiffrage scolaire, soit vraiment guéri, réhabilité, recouvre la « santé » et sa dignité avant de perdre cette étiquette. La souffrance du sujet se prolonge souvent bien au-delà de la « prise en charge ».


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Aucune médecine ne guérit, ni ne prévient l’échec scolaire produit par la compétition, l’ignorance pédagogique et la propagande antipédagogique des sciences cognitives.(1) La médecine tente de réparer les dégâts causés par la théorie « scientifique » de la lecture au bruit, qui est pourtant sa théorie de référence. Ce faisant, elle ne sauve rien de plus que la théorie au prix de beaucoup de souffrances et d’illusions. Aborder le problème sous l’angle pédagogique anéantirait la théorie phoniste et laisserait en friche ce réservoir neuf de « patients » juvéniles, passé de 2 %, dans les années 70, à 12 % aujourd’hui (selon les statistiques des soignants et chercheurs en première ligne du front de lutte).

Ce que l’école ne fait pas – accorder à l’écolier le statut d’apprenant-chercheur en groupe de travail dans son lieu de vie scolaire – la médecine ne peut le faire en dehors d’elle et à sa place. Elle ne peut y suppléer par des « leçons d’orthophonie ». C’est d’humanité, d’intelligence professionnelle, de pratique de l’écrit comme outil de pensée et véhicule de la communication dont les enfants ont besoin, non de thérapie réparatrice ou compensatrice. La modernisation du discours médical et l’inflation de la nomenclature des « troubles » scolaires dans le DSM ne renouvellent pas les méthodes anciennes pratiquées tous les jours dans les écoles musées. Entre la maîtresse qui fait étudier un « son » chaque jour et l’orthophoniste qui fait déchiffrer lettre à lettre, quelle est la différence ? La « méthode » ? C’est la même, entrer dans l’écrit par la porte étroite du déchiffrage, celle qui laisse dehors 25 % des enfants(2). Les deux enseignent les « mécanismes de lecture », à savoir le non sens, avec la bénédiction du pouvoir politique, de l’administration et de l’opinion(3). Il n’y a que le manuel et les auteurs qui changent. La rééducation n’arrange rien, ne change rien. On ne peut comprendre ni apprendre ce qui n’a pas de sens. Quand la lecture au bruit est présentée comme la voie du sens, les superstitions, les croyances, le rationalisme religieux et la dissonance cognitive l’emportent sur la raison éducative. Dans le système scolaire et en médecine annexe, c’est très difficile de renoncer à ses croyances et à ses pratiques. D’abord, parce que l’enseignant est censé savant, ce qui légitime toutes les certitudes, ensuite parce que ces croyances sont partagées par la presque totalité des professionnels et du public, comme une mythologie fondatrice et fédératrice. Cette mythologie est célébrée comme un culte avec ses rites et ses dogmes. Les chercheurs en sciences cognitives en ont fait une bible, recueil de vérités scientifiques non contestables, enseignées aux fidèles en dix commandements :

  1. nul ne peut apprendre à lire sans méthode, dite de lecture ;
  2. nul ne peut rien apprendre qui ne lui ait d’abord été enseigné ;
  3. lire, c’est oraliser les syllabes et les lettres ;
  4. comprendre ce qu’on s’entend prononcer ou murmurer, est le cadeau qu’on se fait quand on sait « lire » ;
  5. une « bonne méthode » doit enseigner les sons, le code de correspondance grapho-phonologique, les mécanismes de lecture, la lecture à l’unité :
    1. La lecture d’apprentissage peut se faire sur une lettre, une syllabe, un mot isolé, hors de toute signification. Le contexte, la phrase ne sont pas des éléments de lecture.
    2. Lire, c’est mettre des sons sur des signes graphiques. Rien d’autre. La prise de sens se fait sur ce qu’on entend, jamais sur ce qu’on voit. Comprendre l’écrit par la « voie directe », ce n’est pas lire ; la recherche de sens pousse les novices à deviner plutôt que déchiffrer. Ils sont fautifs. Il faut les mettre en garde contre cette tentation.
    3. La prise en compte de l’orthographe ne doit se faire qu’après 7 ans, une fois la « méthode » maîtrisée.
  6. en classe, ce n’est pas l’élève qui apprend, c’est le maître qui enseigne ;
  7. avant l’âge de 6 ans, l’enfant n’a pas la maturité nécessaire pour apprendre la lecture (recevoir l’enseignement de la méthode) ;
  8. à 6 ans, on ne peut apprendre que si on est équipé des pré-requis ;
  9. après 7 ans, l’âge d’apprendre la méthode est passé, c’est trop tard ;
  10. le maître enseigne la méthode à tous, chacun apprend individuellement, seul, sans interaction avec les camarades, sans communiquer. 

Si, malgré ces bonnes lois, l’enfant n’apprend pas à lire, c’est qu’il est freiné par un retard de maturité cérébrale ou psychologique ou troublé par une pathologie fonctionnelle corticale. Il faut le soigner par une rééducation stricte de la béabatification.


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Cette idéologie totalitaire devient dictature didactique quand elle s’affiche ouverte­ment dans les instructions ministérielles adressées aux écoles. Elle transforme les maîtres en agents dociles de la pédagogie du tri scolaire par l’échec. Elle leur ôte, en douceur et à leur insu, leur liberté pédagogique, les dissuade de s’interroger, de questionner, de penser leurs pratiques, de douter, de chercher, de se tourner vers les mouvements pédagogiques. Elle traite les élèves tantôt comme des animaux savants à dresser, tantôt comme des récipients à remplir. Les enfants du chœur, à qui on a fait chanter les syllabes, qui n’apprennent pas en famille parce qu’ils n’ont aucun parent lecteur, trinquent très tôt et déchanteront toute une vie. La thèse selon laquelle une même et unique forme d’ensei­gnement, celle qui est favorable aux enfants des classes supérieures, serait appropriée et bénéfique pour l’instruction de tous, indépendamment de leur milieu social, est un des axes de la pensée et de l’idéologie dominantes. De ce mythe résulte que l’école est devenue le bureau d’homologation des savoirs appris ailleurs, tenu par des enseignants qui, malgré l’intention affichée et sincère de faire « réussir » les défavorisés, restent loyaux envers l’école de leur enfance et la théorie dominante, privés de formation pédagogique et matraqués par la propagande phoniste méthodiste. Les chercheurs experts en dyslexie sont doublement étrangers à l’école, ils n’y participent pas à l’action éducative, ils ignorent ce que « pédagogie » veut dire, ce que « lire » veut dire et n’en veulent rien savoir. Igno­rant que rien ne s’acquiert sans interactions, surtout pas la lecture, ils croient qu’elle s’enseigne comme une matière d’enseignement, donc sans la pratiquer, sans travail en groupe et sans échanges entre pairs. Ils croient qu’il faut une méthode pour apprendre à lire, (« une bonne », une phonologique pure qui dresse à faire le bruit de la lettre et que toutes ne le sont pas) que les méthodes mixtes sont globales et que la « globale » est très mauvaise. En effet, cette méthode de syllabation à point de départ global, analytique donc, qu’on ne pratique que dans les écoles Decroly, n’est pas commercialisée. Aucun maître ne la connaît et ne prend le risque de l’utiliser. On y apprend à lire avant d’apprendre à déchiffrer. Ce n’est pas concordant avec la politique scolaire d’alphabétisation, de commercialisation, de sélection et de médicalisation. Aussi invisible que l’Arlésienne, elle fait un bouc-émissaire parfait à qui reprocher l’échec de la méthode phoniste synthétique qui se pratique tous les jours partout. Dans les « bonnes écoles », donc partout, syllaber, c’est lire. Mais la syllabation est à la lecture ce que la dictée est à l’orthographe et la « récitation » à la poésie, un produit de supermarché bas de gamme pour pauvres, une supercherie d’état légale, labellisée scientifique par des savants qui n’ont jamais mis les pieds dans une classe pédagogique et, peut-être, jamais assisté à une « leçon de lecture » (son du jour) dans une classe traditionnelle.


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Leçon. Le son ien : « ien, lien, lient, plient, client ». Comment l’enfant docile peut-il sonoriser ces mots ? Si j’ajoute une lettre (t) à lien, j’enlève un son. Plient a deux lettres de plus que lien, un nombre identique de sons mais différents. Client a le même nombre de lettres que plient, mais un son de plus. Comme le dit Emilia Ferreiro, ce ne sont pas les lettres qui « se prononcent » d’une certaine manière ; ce sont les mots qui s’écrivent d’une certaine façon. Les phonistes ne veulent pas « l’entendre ». Ils nous disent que l’écrit n’est pas un langage autonome, avec ses règles propres, créateur de pensée, d’humanité et de culture. C’est juste le réservoir des sons de la langue parlée, la mémoire de l’oral. C’est ce qu’ils font croire aux enfants naïfs, à leurs parents et à leurs maîtres. Bien sûr, l’écrit code du son, mais il va bien au-delà. C’est une langue en soi, une langue des signes que les malentendants et sourds-muets peuvent utiliser sans détour par l’oral. Il arrive que les majuscules changent la nature, le genre et le sens des mots : cher, Cher, perche, Perche, paris, Paris. Pour « décoder » des syllabes homographes, il vaut mieux ne pas se fier aux oreilles, l’œil est plus sûr : chercher moins cher, aimer ramer en mer. Le son ne précède pas le sens, mais en procède : pour se lever de bonne heure il faut se coucher plus tôt ; pour une meilleure journée il faut plutôt se lever de bonheur. La différence, bien réelle, ne s’entend pas car l’écrit utilise des éléments linguistiques de sens, inexistants à l’oral, purement graphiques, saisis par l’œil, imperceptibles à l’oreille, les lettres « mu­ettes » (pluriel, féminin, homophones hétérographes – verre, ver, vers, vert, bonheur, bonne heure, plus tôt, plutôt), la mise en forme, la mise en page, les paragraphes, la ponctuation, la typographie, l’illustration, l’ordre des mots dans la phrase(4). Tout ce qui permet l’incroyable rapidité de l’exploration et de la compréhension visuelles, quatre fois supérieure à la syllabation, l’instantanéité de l’écrit, les méthodes n’en disent mot, les phonistes l’ignorent. Si les élèves savaient, ils se passeraient de déchiffrage et de méthode. Les favorisés bien nés s’en passent et se font lecteurs clandestins. Les autres, victimes d’abus didactique, suivent la méthode à la lettre et n’apprennent pas à lire.


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Sous le débat « pédagogique », ce qui ne s’entend pas, ce qui se joue sans bruit, sans phonologie, ce sont des intérêts économiques, des carrières, des notoriétés, des postes, des emplois, des groupes commerciaux, le leadership, le pouvoir de décision, les luttes d’influence sur l’orientation des politiques scolaires, la résistance à la démocratisation de l’école. La survie de certaines professions de soins dépend du nombre d’élèves malades dans l’école (ou de l’école). Défense corporative très légitime, mais peu respectable quand elle se cache sous la plaidoirie des intérêts de l’enfance. Parés des habits de l’orthodoxie, on rassemble souvent son énergie pour défendre, qui sa foi, qui sa théorie, qui sa doctrine, qui son travail de recherche et ses publications, qui les intérêts de sa corporation. C’est rarement dans l’intérêt de l’enfant. C’est le déni généralisé de la pédagogie, l’authentique, celle qui se centre sur l’enfant lui-même, qui n’est représentée par aucune organisation agréée, ni mutuelle. Les pédagogues, saumons solitaires à contre-courant, privilégient l’innovation et le changement sur la tradition requalifiée norme par les conservateurs. Hélas, la pédagogie n’appartient ni à la culture, ni à la nature de l’école française. On ne la trouve ni dans les classes, ni dans les programmes politiques, ni dans les laboratoires de recherche. On en parle dans la presse quand il est question de la reconduire à la frontière. Pendant ses quinze années de scolarité, un Français a une très faible probabilité de croiser un pédagogue dans sa classe ou dans un couloir. Par contre, on trouve très facilement des soignants, en nombre, dans l’environnement proche des écoles. Pourquoi ne pas inviter les sociétaires MAIF, enseignants, accompagnants, cadres, administrateurs et formateurs à se connecter avec les groupes et mouvements pédagogiques, dont la réflexion, plutôt que la compassion, est centrée sur l’enfant ? Pourquoi, outre les articles sur les prétendues maladies nouvelles, ne pas en publier aussi sur la pédagogie et la psychologie des appren­tissages, articles qui concerneraient 100 % des élèves, de leurs maîtres et de leurs parents, y compris les 2 ou 3 % d’enfants dits dys ?(5) Pour que tous les enfants apprennent à lire, il suffirait de renoncer à la syllabation, aux mal nommées méthodes de lecture, aux « devoirs », aux notes et à la sanction de l’erreur. Personne n’apprend sans se tromper. Pour apprendre un outil, il faut s’en servir. On apprend la bicyclette en roulant. Or, l’école enseigne la structure de la langue et les règles linguistiques tout en négligeant sa pratique et l’usage de la BCD. Elle en invente aussi, comme le « code de correspondance » dont l’enseignement mange le temps de lecture. Connaître la nomenclature des pièces, leur démontage et leur remontage sera utile au cycliste confirmé qui veut faire le trajet Marseille-Roubaix en 6 jours par les départementales. Ce travail de mémorisation méca­nique est néfaste à l’enfant de 6 ans à qui on enseigne la bicyclette sans bicyclette dans l’espace scolaire. Le déchiffrage enseigné n’est pas la lecture, ni son préalable. On apprend à lire en lisant, directement, sans détour par le son. À l’école traditionnelle contemporaine, on lit exceptionnellement et toujours en complément de la leçon, s’il reste du temps à « l’emploi du temps ». On n’y écrit pas, « parce qu’on ne sait pas encore et qu’il faut attendre de savoir pour le faire ». Pendant sa leçon de « lecture », le maître réclame la plus grande attention auditive, contraignant les enfants à l’inaction. Cet enseignement est bien le vrai danger. Ne lisant pas, ne communiquant pas, n’interagissant pas, les élèves ne sont pas en situation d’apprentissage. Les enfants lecteurs ne peuvent pas aider leurs camarades. La leçon du jour du maître, occupant tout le temps de classe, n’en laisse aucun pour les élèves. Les non lecteurs en sortent persuadés qu’ils ne « travaillent » pas bien ou pas assez, ou bien qu’ils ne sont pas capables. Ils développent un sentiment de culpabilité, d’infériorité, d’indignité, voire de nullité. Avant de passer la main à la médecine des pathologies dites d’apprentissage et à l’orthophonie, il faudrait d’abord enseigner la lecture et l’écriture, les vraies, non leurs caricatures scolaires(6). Dans le temps gagné, les ensei­gnants (et les autres) mettraient leurs élèves en situation d’agir, d’interagir, de travailler, de parler, d’écrire, de lire – lire pour penser avec les yeux, non pour oraliser avec la bouche mot après mot –, d’échanger, de communiquer, de produire des savoirs et de les partager. Petite révolution sans barricades et sans fusils dont Gavroche sortirait lecteur. Changement de changement(7) redouté, ô combien, par un système sclérosé par la tradition. Dans l’école à la française, les motivations pour apprendre et le sens des apprentissages se confondent à travers le simpliste sermon : bien écouter, bien « travailler », bien réciter, pour être bien noté, bien classé, « récompensé ». Participer à la compétition pour gagner si on est un des meilleurs, pour ne pas perdre si on est un des « mauvais », quelle stimulation exaltante !


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La réforme scolaire, ce ne sera pas « maintenant », ni demain. C’est très domma­geable pour la démocratie en général et pour la République Française en particulier. Telle école, telle république !

Laurent Carle
mai 2013

 
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Complément

À propos du billet de Luc Cédelle, journaliste au Monde, publié sur son blog Interro Ecrite le 24 janvier 2014, intitulé Le catéchisme « antipédago », le « gender » et la nouvelle extrême droite soralo-dieudonniste

L’itinéraire socio-politique de Farida Belghoul nous montre que, lorsque, débarquant de « l’ascenseur social », issu du sous-sol social, on pose ses pénates sur le palier du dernier étage de la pyramide, l’idéologie originelle ne suit pas. Fasciné par le pouvoir et sa rhétorique, on adopte celle de la classe dominante. La réussite sociale précédée de la réussite scolaire semble la seule aventure personnelle institutionnellement correcte. Il n’y a pas d’alternative au culte du salut scolaire individuel calqué sur le modèle religieux des paradis monothéistes. L’entrée au firmament social, un par un, l’un après l’autre, nous est présentée comme la seule modalité possible de conquête de l’appareil de commande par les classes populaires. Mais, bien entendu, le passeport acquis par « le travail et le mérite » donne le droit de prendre part aux festins des princes et aux cérémonies de remise des prix, sur l’estrade, pas de transformer la république bourgeoise des parvenus en une république de citoyens libres, égaux et frères. Il n’est bon bec que de rapports de classe « dominants-dominés ». La révolte et la désobéissance idéologique ne sont pas plus à l’ordre du jour des conseils d’école et de classes que des discours des gardiens de l’idéologie. L’alternative pédagogique pour une réussite collective ne trouve pas preneurs ailleurs qu’auprès des 5 % de professionnels pédagogues que la réaction de droite et de gauche rassemblée autour de « valeurs communes » nomme « pédagogistes » et à qui elle attribue la faute de « l’échec scolaire des enfants du peuple ». Pour être, à ce point, activistes et subversifs, ces 5 % de profs minoritaires possèdent probablement une arme de destruction massive.

Mais, les profs, sortis vainqueurs des concours sélectifs, seraient-ils aux postes qu’ils occupent, si leur système scolaire préféré, ’école compétitive, n’avait pas éliminé 80 % de leurs « concurrents », dès le CP ?

Laurent Carle
26 janvier 2014

 
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Notes

(1) Les Groupes d’Aide Psycho Pédagogique créés pour injecter de la pédagogie dans les écoles et prévenir les redoublements, dont la finalité était de travailler à se rendre inutiles, furent vite remplacés par des Réseaux d’Aides Spécialisées aux Elèves en Difficulté. Si ces mots ont du sens, ils nous révèlent les intentions politiques scolaires des gouvernements de la république : gérer le statu quo, pérenniser les conditions de victoire des héritiers.

(2) Et encore, un écrit exclusivement scolaire, qui ne sert ni à penser, ni à communiquer, tout juste à faire « ses devoirs ». L’écrit, social ou littéraire, est un langage qui se construit et se maîtrise, comme tous les langages, en le pratiquant dans l’échange, l’usage et la production. Apprendre à lire-écrire en étudiant – en mémorisant – des règles « au programme », surtout celles dites du « code de correspondance », dont le véritable but est de rendre nécessaire l’utilisation de méthodes dites de lecture en vente dans le commerce, n’a jamais conduit à la maîtrise de l’écrit. Ni de ses règles.

(3) Les mécanismes. Selon la théorie dominante qui hante toutes les « méthodes » commercialisées en France, l’enseignement de la lecture ne s’adresse pas à l’intelligence de l’apprenti lecteur. C’est juste un dressage qui sollicite la moelle épinière. Cette insulte à l’intelligence et à la dignité de l’enfant ne provoque ni manifestation, ni pétition, ni protestation au pays des manifs de rue. Au contraire, elle réunit, en une congrégation improbable de gardiens du temple, des écrivains, des savants, des scientifiques et universi­taires de diverses disciplines, des philosophes conservateurs ou contestataires, des ministres, des politiciens de tous bords, des psychologues, des médecins, des journalistes qui ne s’entendent guère dans leurs analyses, mais montent loyalement la garde autour de l’enseignement traditionnel de la lecture contre l’innovation et « l’intrusion » pédagogique. Ils font le nécessaire pour qu’aucune information pédagogique intempestive ne vienne ternir l’innocence de professionnels sans formation. L’antiquité de cette « méthode », la même depuis le Moyen Âge, du temps où l’imprimerie n’existait pas, fait l’unanimité. Dans ses éditions modernes en couleur, elle sent toujours la plume trempée dans l’encre violette.

(4) À propos des muettes, Éveline Charmeux nous propose cet exemple : « Vous êtes venue ». Elle nous fait remarquer que cette courte phrase en trois mots commence au pluriel et finit au féminin singulier ! Qu’en dit le « code » phonographique ? Est-ce le son qui donne le sens ? L’écrit est-il la transcription de la langue parlée ? À l’oral, pour connaître le sexe (et le nombre) de l’interlocuteur, il faut que la personne soit présente. À l’écrit, une petite voyelle muette suffit. L’enfant élevé au son pensera qu’il y a une faute quelque part, il corrigera et l’erreur induite par l’enseignement des « mécanismes de lecture » lui sera comptée comme faute. Enfant sonné, enfant trompé ! Diagnostic : dyslexie, dysorthographie ou abus didactique ?

(5) Tiens, le « dix » se « lit » comme le « dys », mais il ne se « lit » plus pareil quand j’écris « dix jours » et autrement encore si j’écris « dix heures » ! Bizarre ! Lire semble plus synonyme de penser et comprendre que de déchiffrer. Le déchiffrage est un parcours aléatoire à vue avec l’oreille, au raz des pâquerettes. La vraie lecture est un exercice intellectuel à l’œil et au flair, à hauteur de la pensée. Ce n’est donc pas le code de correspondance qui dit le son des lettres, c’est le contexte, contrairement à ce que prétendent les méthodes, les méthodistes du son, les experts en dyslexie et les réparateurs de dys. Bien sûr, tout le monde a droit à l’erreur. Toute erreur instruit, du moins celui qui en constate les inconvénients. Apprendre, c’est renoncer à ce qu’on croyait savoir. Les phonistes, eux, présentent la leur comme un dogme et le « code de correspondance », comme norme de lecture scolaire excluant toute autre voie d’accès à l’écrit.

(6) « Il s’agit d’apprendre à lire et d’apprendre à penser sans jamais séparer l’un de l’autre. Or, une syllabe n’a point de sens, et même un mot n’en a guère. C’est la phrase qui explique le mot… C’est par les yeux qu’il faut penser, non par les oreilles. Il faut donc former l’enfant à cette lecture par les yeux… lire des yeux définit une époque de l’humanité dans laquelle nous entrons à peine… »
« Savoir lire, ce n’est pas seulement connaître les lettres et faire sonner les assemblages de lettres. C’est aller vite, c’est explorer d’un coup d’œil la phrase entière ; c’est reconnaître les mots à leur gréement, comme le matelot reconnaît les navires. C’est négliger ce qui va de soi et sauter à la difficulté principale… La lecture qui ânonne ne sert à rien. Tant que l’esprit est occupé à former les mots, il laisse échapper l’idée… »
Alain, Propos sur l’éducation.

(7) Le changement I est celui qui ne pose que peu de problème et soulève le moins de résistance. Par exemple, le recrutement des enseignants de primaire à bac + 5 et l’alignement de leurs salaires sur ceux des autres catégories de collègues, la réduction des effectifs de classe et des horaires de travail, l’introduction de personnels auxiliaires pour décharger les maîtres, le recours à des officines extérieures pour le traitement des élèves « en échec ». C’est, généralement, un changement à effet feed-back négatif, qui renforce le statu quo (plus de la même chose).
Le changement II (“changement de changement”), à effet feed-back positif avec causalité circulaire, place la majorité des professionnels concernés dans une situation embarrassante au plan personnel comme aux diverses corporations. Par exemple, pour les enseignants :
1. renoncer aux notes, aux classements et aux redoublements,
2. remplacer les notes par des livrets d’évaluation de compétences,
3. accorder aux élèves le statut de chercheurs avec le droit à l’erreur,
4. travailler en équipe, en conseil de cycle,
5. suivre une cohorte d’élèves pendant la durée du cursus primaire ou d’un cycle,
6. accepter une classe composée des 3 âges-niveaux d’un même cycle et, d’une manière générale, l’hétérogénéité,
7. transformer en réunion de réflexion pédagogique les conseils d’école ou les conseils de classe, traditionnellement détournés en jurys d’examens internes,
8. utiliser la BCD comme centre et plateforme des projets éducatifs et des apprentissages,
9. renoncer à utiliser un manuel de lecture nommé méthode pour permettre aux jeunes élèves de s’apprendre à lire et écrire en communauté éducative d’apprentissage,
10. accepter de faire plus d’heures dans les murs que de « temps d’enseignement » exigé par la loi,
Pour les psys :
1. cesser de faire passer des examens psychologiques avec batteries de tests et les remplacer par des observations en classe, par des sociogrammes, par des tests collectifs qui ne soient pas des répliques psychotechniques de « contrôles » de connaissance et examens blancs, par des entretiens de conseil éducatif entre membres de l’équipe éducative, conseil éducatif devenu supra-système éducatif démocratique et pédagogique, ou entre l’ensemble du personnel enseignant de l’école, soit pour régler un problème avec un élève isolé, soit pour se concerter en vue de l’établissement d’un projet d’école annuel ou trimestriel, destiné à réduire les échecs scolaires caractérisés et définis en équipe,
Bref, faire passer avant sa carrière ce pour quoi on est payé, l’intérêt des enfants. En présence d’aléas et d’imprévus, faire preuve de courage, de ressource intellectuelle, être créatif, en cohérence avec le statut et les missions d’un fonctionnaire du cadre A, et non exécuter des ordres et des instructions « officielles » conservatoires, comme dans le cadre B. De culture jacobine et bonapartiste, le système scolaire français fonctionne selon le principe d’homéostasie.
Généralement le changement I consiste à accepter les réformes scolaires qui ne changent rien et à ranger au fond de l’armoire celles qui révolutionneraient la pensée et le cours des événements. Le changement II demande du questionnement, de l’audace, de la créativité et du caractère.

 
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Dernière révision : mardi 28 janvier 2014 – 11:00:00
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