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Programme d’enseignement des classes d’enfants arriérés



Initialement, ce texte m’a été aimablement communiqué par Jean-Louis Moracchini. Merci à lui !
Je l’ai ensuite vérifié et complété par consultation du J.O.R.F. du 25 août 1909 disponible en fac-similé sur le site Gallica.

 


Arrêté du 18 août 1909


Le président du conseil, ministre de l’intérieur et des cultes, chargé de l’intérim du ministère de l’instruction publique et des beauxarts,
Vu la loi du 15 avril 1909 portant création de classes de perfectionnement annexées aux écoles élémentaires publiques et d’écoles autonomes de perfectionnement pour les enfants arriérés, notamment l’article 14 ainsi conçu : « Des décrets et arrêtés rendus après avis du conseil supérieur de l’instruction publique détermineront la nature du programme d’enseignement et les conditions d’obtention du certificat spécial. »
Vu le décret du 14 août 1909 ;
Vu l’arrêté du 17 août 1909 ;
Le conseil supérieur de l’instruction publique entendu,
Arrête :


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Article premier

Les programmes d’enseignement dans les classes annexées et les écoles autonomes de perfectionnement pour les enfants arriérés de sept à treize ans seront établis d’après les indications générales ci-après et les instructions ci-annexées.

(Les exercices d’une demi-heure devront être entrecoupés de pauses.)

Fait à Paris, le 18 août 1909.

ARISTIDE BRIAND.


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Programme

Pliage, cartonnage, mesurage, pesage, constructions et assemblages en carton et en bois (se reporter pour ces exercices aux programmes des écoles maternelles).

Chant.

Jeux scolaires dirigés.

Promenades et soins du jardin.

Dessin libre et dessin proposé, modelage.

Exercices de prononciation et d’articulation.

Commencement de la lecture et de l’écriture, en décomposer les mécanismes. Multiplier les questions sur le sens des mots, le pourquoi et le comment des choses.

Premiers exercices de calcul : compter de 1 à 10, de 20 à 50, de 50 à 100, etc., en maniant et combinant des objets concrets. Dans les dernières années, apprendre à compter : addition, soustraction et multiplication très simples et toujours dans le principe avec des objets concrets.

Notions de géographie : Étudier le relief du sol. Commencer par la topographie du jardin, de l’école, du quartier, etc.

Leçons de choses : Étude d’objets usuels mis sous les yeux des enfants. En décrire les couleurs, la forme, l’usage. Procéder par répétitions fréquentes.

Leçons de vie pratique. Raconter des histoires, des anecdotes, de petites biographies qu’on fera répéter par les enfants en interrogeant, en provoquant des questions. En tirer des leçons de morale pratique.

Commencer les travaux les plus simples d’atelier et de jardinage.

Exercices spéciaux de gymnastique.


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Instruction générale

Les maîtres suivront les programmes des écoles primaires dans la mesure où le comporteront les aptitudes des élèves. Ils devront le plus souvent se contenter de la lecture, de l’écriture et des éléments de calcul. Ils s’attacheront à provoquer et à retenir l’attention par l’attrait de ce qu’ils montrent et disent, par la variété et l’imprévu des exercices. Ils n’useront qu’avec discrétion de la récitation littérale. Ils éviteront les définitions, les règles, les formules. Ils ne feront réciter et copier que des notes et des phrases dont ils s’assureront que les élèves comprennent le sens. Ils auront le plus souvent recours à la leçon de choses. L’enseignement sera donné par la vue directe des objets et des êtres, par des images, par des causeries familières dirigeant l’attention de l’enfant vers l’observation de l’action et de la vie.

On donnera un développement particulier aux exercices suivants :

Le chant et la musique, généralement bien goûtés par les enfants anormaux.

Des exercices de langage et d’articulation pour corriger les vices de prononciation généralement fréquents chez cette catégorie d’enfants.

La gymnastique simple et rationnelle, expurgée de tout exercice d’athlétisme, avec, s’il se peut, accompagnement de musique pour rythmer les mouvements.

Les jeux scolaires de course et d’adresse, organisés et dirigés par les maîtres qui veilleront à ce que les élèves apathiques et rétifs ne s’isolent pas de leurs camarades.

Des leçons de vie pratique, afin de mettre les anormaux en mesure de se suffire et de s’adapter à leur milieu. Aux enfants les plus petits, on apprendra à se laver, à s’habiller, à manger proprement. Aux plus âgés, on apprendra à se présenter, à écrire une lettre, à compter son argent, à l’économiser, à voyager ; aux plus intelligents, on enseignera des notions élémentaires d’hygiène, et surtout des règles de morale, particulièrement précieuses aux jeunes filles d’intelligence débile, partant plus exposées.

Le travail manuel. Le but des écoles de perfectionnement n’est pas seulement d’assurer aux enfants arriérés l’instruction à laquelle ils ont droit, mais encore d’éviter qu’ils ne tombent à la charge de la société. Ainsi, l’enseignement du travail manuel qui leur sera donné devra-t-il être nettement orienté vers l’apprentissage et ses applications concrètes. C’est surtout dans les internats de perfectionnement, qui gardent les enfants jusqu’à seize ans et même dix-huit ans, que le travail manuel devra être développé. Dans les milieux ruraux, c’est vers l’enseignement agricole qu’il convient de les diriger de préférence. C’est pourquoi il est désirable qu’un jardin scolaire d’enseignement fasse partie de chaque école de perfectionnement. Dans les milieux urbains, des ateliers seront aménagés pour un apprentissage rationnel et complet, répondant à des besoins locaux ou régionaux. Ce qui convient le mieux, ce sont les métiers simples pouvant s’exercer partout, le travail du bois, du fer, les confections, la cordonnerie, les broderies, etc., à condition d’apprendre entièrement la profession choisie.


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Instructions relatives aux écoles de perfectionnement

Les programmes ci-dessus, concernant les classes annexées, seront suivis et serviront de guides dans les écoles autonomes qui possèdent des classes de la scolarité élémentaire. Mais ces écoles retiennent surtout les enfants qui ont passé l’âge de cette scolarité et les gardent jusqu’à seize ans environ et au-delà.

À ces enfants s’appliquent aussi les programmes précédents. Ils suivront les mêmes exercices, plus développés, plus étendus, et les maîtres s’efforceront de les rapprocher le plus possible de ceux qui sont en usage dans les classes élémentaires d’enfants normaux.

Cependant, dans les écoles de perfectionnement, la moitié du temps, et quelquefois davantage, sera occupée par les exercices de travail manuel.

Il faudra fixer l’attention de l’enfant, provoquer et perfectionner ses facultés d’imitation, puis, par l’observation, par l’analyse raisonnée de ses propres mouvements ou de ceux du maître, par l’examen de ses outils, de leurs rapports, de leur proportion avec la matière d’œuvre, développer son jugement, pour qu’en présence d’un nouveau travail on puisse faire appel à sa mémoire et à son raisonnement.

À cet effet, dans les centres urbains, un ou plusieurs ateliers seront toujours joints à l’école. Les métiers choisis devront être les plus connus et les plus faciles, ceux dont les produits fabriqués s’écoulent le plus aisément dans la région. Ceux qui conviennent le mieux sont le travail du bois, du fer, la confection des habits, la cordonnerie, la vannerie, à condition d’apprendre complètement la profession choisie.

Dans les milieux ruraux on exercera surtout les enfants aux travaux de jardinage et d’agriculture ; ce sont ceux qu’ils préfèrent, ceux aussi où ils trouvent le plus facilement à s’occuper au sortir de l’école.


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