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Chronique 26
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Un texte de M. Barthélémy
 

J’ai eu la chance d’assister, samedi dernier, à la journée que la toute jeune et dynamique association Utopsy fondée par des internes en psychiatrie consacrait à la place de la folie dans notre société.

Lancée avec brio par sa présidente Loriane Brunessaux dans une présentation claire, articulée, brillamment mise en mots, cette journée a vu défiler des interventions de haut niveau de professionnels du soin psychiatrique, de l’Éducation nationale, de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, de philosophes, de sociologues, mais aussi de patients ou de précaires qui ont montré comment les parcours de ceux que notre société (nous, en fait...) relègue dans ses marges interrogent notre manière de mettre en liens et de créer de la fraternité.


J’ai particulièrement été frappé et/ou touché par quatre inter­ventions (mais tout choix est un déchirement, tant d’autres ayant été de qualité) :

• celle de Francis Bailleau, sociologue au CNRS, spécialiste de la justice des mineurs, qui a montré comment la remise en cause de l’ordonnance de 1945 vient de plus loin qu’on ne l’imagine ordinairement, que le consensus issu du Conseil National de la Résistance est en train de voler en éclats, et comment une société qui a peur de ses jeunes au point de n’avoir pour eux d’autre horizon que de les enfermer n’est pas seulement une société malade, mais une société qui court à sa perte ;

• celle de Bertrand Ogilvie, philosophe et psychanalyste, qui, en lui empruntant parfois ses mots dépouillés et sa syntaxe chantournée, nous a conviés à suivre le parcours de Fernand Deligny et sa manière toute personnelle d’accompagner les autistes, considérant l’autisme comme une manière d’être au monde qui a à voir avec l’infini et nous enseigne sur nos espaces propres ;

• celle de Hélène Davtian, psychologue à l’UNAFAM, et auteure d’une enquête sur les fratries face aux troubles psychotiques, qui a su dire la fêlure à fleur de mots de ceux qu’on ne voit pas tant l’on est préoccupé de la maladie mentale de leur frère ou de leur sœur – l’autre moi-même différent –, dont la maladie appelle et repousse tout à la fois, entre fascination et peur ;

• celle de Francis Bérezné, artiste peintre, dont la folie évoquée n’a pas interdit que se construisent des amitiés soignant-soigné qui, la folie quittée, ont perduré et dont les mots pour dire ce parcours ont pu rencontrer la folie en chacun de nous pour peu qu’on ne la repousse pas toujours.


Moments forts où j’ai été invité à penser, à déstabiliser des représentations anciennes et/ou commodes, à communier dans une émotion maîtrisée et réellement partagée – offerts par une « bande de jeunes gens » ne se prenant pas au sérieux, mais faisant sérieusement œuvre de salubrité publique en ces temps où la psychiatrie se judiciarise, où la prédiction remplace la prévention, où l’éducatif disparaît derrière le répressif.

Merci à eux !


L’enseignant référent que je suis, dont près de 40 % des projets personnalisés de scolarisation que j’ai à suivre se situent dans le champ de la maladie mentale, dans un amalgame de plus en plus intolérable entre cette dernière et le handicap, a trouvé en ce samedi montreuillois ressources, raisons d’espérer et motivation nouvelle – ce qui n’est pas rien en ces temps qui évoquent de plus en plus des temps que l’on espérait révolus et qui ne demandent qu’à revenir au galop des chevaux de l’Apocalypse.

M. Barthélémy
17 mars 2009

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Pour écrire à M. Barthélémy : “monsieurbarthelemy–AROBASE–gmail.com” (...en remplaçant bien sûr “–AROBASE–” par “@”)

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